Contexte 1 2
De vastes zones du Sahel se caractérisent par des précipitations très intenses qui donnent lieu à un ruissellement et une érosion généralisés. Face à cette situation, la priorité a été accordée à une série de mesures de lutte contre le ruissellement et l’érosion des sols. L’une de ces mesures, en l’occurrence la construction de cordons pierreux sur des courbes de niveau naturelles, a été promue et soutenue par les gouvernements, les ONG, les agents de vulgarisation et les agriculteurs pendant plus de 25 années et est à présent largement utilisée dans le Sahel. Les meilleurs résultats sont souvent obtenus lorsque ces cordons pierreux sont combinés avec la plantation d’herbes et d’arbres sur les courbes de niveau. En outre, lorsque les sols sont particulièrement sujets à l’encroûtement et exposés au ruissellement, les agriculteurs combinent souvent des cordons pierreux avec des trous de plantation d’une profondeur de 10 à 20 cm communément appelés « zaï », qui tiennent lieu de micro-ouvrages de collecte d’eau et dans lesquels sont plantées les cultures (Roose et al. 1999). 3
Lien avec l’AIC
Les cordons pierreux sont avantageux dans les scénarios de changements climatiques plus secs et plus humides. Pendant les années plus humides, ils aident à réduire les risques de ruissellement et d’érosion induits par le climat. Pendant les années plus sèches, ils favorisent une récupération efficace des eaux pluviales. En outre, étant donné que les fortes précipitations dans le Sahel sont censées augmenter à la faveur du réchauffement climatique, la construction d’ouvrages durables et efficaces de lutte contre l’érosion des sols deviendra de plus en plus importante et constituera une mesure d’adaptation essentielle. Par ailleurs, lorsque des rangées d’arbres et/ou des bandes enherbées sont également plantées sur le cordon, elles peuvent contribuer à la séquestration du carbone de surface et souterrain.
Impacts et leçons apprises
À l’échelle de la région, on estime qu’environ 300 000 ha de terres ont été aménagés. Cependant, les cordons pierreux sont exigeants en main-d’œuvre et coûteux. Par exemple, entre 1987 et 2006, le projet PATECORE a aidé à aménager plus de 100 000 ha de terres dégradées au Burkina Faso avec 30 000 km de cordons pierreux. Toutefois, cet effort a nécessité l’extraction et le transport de 2,5 millions de mètres cubes de pierres, pour un coût net de 200 $ EU/ha et 100 à 150 personnes-jours de travail non rémunéré par hectare de la part des agriculteurs. Néanmoins, ils se sont avérés à la fois très efficaces et durables, et tiennent lieu souvent d’élément catalyseur pour des innovations supplémentaires telles que la plantation d’arbres ou d’herbes sur les cordons, ainsi que l’augmentation des apports en nutriments pour les grandes cultures.
References
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Landolt M. 2011. Stone lines against desertification. Rural 21, January 2011.
http://www.rural21.com/fileadmin/_migrated/content_uploads/Stone_lines_against_desertification_01.pdf Cette fiche fournit aux agriculteurs des informations et des histoires de réussite sur la pratique consistant à utiliser des cordons pierreux pour améliorer l’utilisation des eaux pluviales et ralentir l’érosion au Burkina Faso. -
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Barry B, Olaleye AO, Zougmore R, Fatondji D. 2008. Rainwater harvesting technologies in the Sahelian zone of West Africa and the potential for outscaling. IWMI Working Paper 126. Colombo, Sri Lanka: International Water Management Institute.
http://www.iwmi.cgiar.org/Publications/Working_Papers/working/WOR126.pdf En Afrique de l’Ouest, en particulier dans les pays sahéliens du Burkina Faso, du Niger, du Mali et de la Mauritanie, des séquences pluviométriques irrégulières pendant l’année et d’une année à l’autre ont souvent conduit à de grandes incertitudes liées à la production des cultures pluviales. Au cours des trois dernières décennies, de graves pénuries alimentaires imputées à la sécheresse ont été fréquemment signalées dans plusieurs pays sahéliens, dont la plupart figurent parmi les moins développés au monde. Les longues périodes sèches qui touchent la majorité des pays arides et semi-arides de l’Afrique de l’Ouest ont pour corollaires la famine, le déplacement de populations et la perte de terres naguère fertiles. L’un des défis liés aux Objectifs du Millénaire pour le développement (OMD) consiste à faire reculer la pauvreté et la faim et veiller à ce que les interventions entreprises dans l’agriculture pluviale en Afrique de l’Ouest soient couronnées de succès et transforment les moyens d’existence de nombreux petits agriculteurs pauvres en ressources. Des méthodes novatrices et purement locales visant à améliorer les rendements des cultures grâce à la gestion intégrée des terres et de l’eau, notamment la collecte des eaux de pluie et la conservation de l’eau du sol, ont été testées avec succès et, dans certains cas, adoptées en Afrique de l’Ouest. Cet article met en lumière des interventions réussies axées sur des techniques locales de récolte des eaux pluviales/conservation de l’eau du sol telles que le zaï ou tassa, les cordons pierreux et la demi-lune dans les zones sahéliennes de l’Afrique de l’Ouest au cours des dix dernières années et leurs contributions à l’amélioration de la sécurité alimentaire et à l’allègement de la pauvreté. Il se penche également sur le potentiel d’adoption de ces techniques au niveau de l’exploitation et de leur mise à échelle dans des zones présentant des caractéristiques agroécologiques similaires. -
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Roose E, Kabore V, Guenat C. 1999. Zai Practice: A West African Traditional Rehabilitation System for Semiarid Degraded Lands, a Case Study in Burkina Faso. Arid Soil Research and Rehabilitation 13(4):343-355.
http://dx.doi.org/10.1080/089030699263230 Pour la productivité des sols dégradés, la restauration et la remise en état de la couverture verte, il est essentiel d’étudier et d’améliorer les systèmes agricoles traditionnels, en particulier dans les zones soudano-sahéliennes, où les possibilités techniques sont limitées. Un exemple est la technique zaï, un système très complexe de restauration des sols utilisant la localisation de la matière organique, les termites pour creuser des canaux dans les sols encroûtés, la récupération des eaux de ruissellements dans les microbassins hydrographiques et le semis du sorgho ou du mil dans des trous sur des sols sablonneux. Des enquêtes menées dans de nombreuses exploitations du Plateau Mossi (Nord du Burkina Faso) ont révélé une série de variations du système zaï en fonction de la texture du sol, de la disponibilité de main-d’œuvre et de matière organique, ainsi que de la pertinence pour la remise en état de ces sols dégradés. Nous décrivons un système complexe de restauration des sols révélé au cours de nos 2 années d’enquêtes et d’expériences, en testant ce système dans deux types de sols (un alfisol peu profond et un inceptisol tropical brun profond). La production de biomasse par le sorgho a été rapportée en lien avec diverses améliorations potentielles des systèmes zaï, ainsi que l’apparition d’espèces d’herbes et d’arbustes sauvages après 2 à 7 années d’utilisation d’un système de culture zaï sur des sols dégradés. Les améliorations expérimentales de ce système sur deux sols confirment la possibilité non seulement d’augmenter la production de céréales (de 150 à 1700 kg/ha) et de paille (de 500 à 5 300 kg/ha) sur des sols brun foncé (eutropept), mais également de réintroduire une grande diversité de plantes utiles pendant la période de jachère et le processus de restauration des sols dégradés. La concentration d’eaux de ruissellement, de fumure organique et d’un complément de nutriments minéraux dans les microbassins hydrographiques a augmenté la production de biomasse sans modifier considérablement les propriétés du sol après 2 années. Ce système peut être utile non seulement pour restaurer la productivité du sol, mais également pour son reverdissement, par exemple 22 espèces de mauvaises herbes et 13 espèces d’arbustes fourragers dans du fumier sec (3 Mg/ha/an).