Contexte
L’agriculture de conservation (AC) a été introduite dans les années 30 comme un système de conservation des sols en vue de lutter contre le Dust Bowl (bol de poussière) aux États-Unis. Plus récemment, elle a fait l’objet d’une promotion et d’une adoption généralisées en Amérique latine. Cependant, en Afrique, son adoption par les petits exploitants agricoles a été plus timide et plus spécifique au contexte (FAO 2009 1). L’AC repose sur les trois principes présentés ci-dessous (Richards et al. 2014 2):
- Perturbation minimale du sol : la culture sans travail du sol est idéale, mais le système peut impliquer un labour contrôlé en vertu duquel pas plus de 20 à 25 % de la surface du sol est perturbée.
- Rétention des résidus de récolte ou autre matière recouvrant la surface du sol : bien que de nombreuses définitions de l’AC fixent à 30 % le niveau minimum de la couverture organique permanente du sol, le niveau idéal est spécifique au site.
- Recours à la rotation des cultures : la rotation des cultures, en principe avec des légumineuses, contribue à réduire la prolifération des adventices, des parasites et des maladies. Lorsque les agriculteurs ne disposent pas de suffisamment de terres pour pratiquer la rotation des cultures, ils peuvent recourir aux cultures intercalaires.
Lien avec l’AIC
L’AC appuie l’adaptation en réduisant le risque de ruissellement des eaux de pluie et d’érosion des sols et peut aider à faire face à la sécheresse en augmentant la rétention de l’eau dans le sol. Ceci est particulièrement important dans les régions où des conditions climatiques plus arides et/ou des précipitations extrêmes plus fréquentes sont prévues. L’AC peut atténuer les effets des changements climatiques grâce à la séquestration du carbone dans le sol, bien que cet avantage puisse ne pas être aussi important que souhaité à l’échelle mondiale (Richards et al. 2014). 2
L’AC et les meilleures pratiques de gestion dans les systèmes de culture du riz et du blé de l’Asie du Sud ont amélioré de manière considérable la productivité, tandis que l’intensité potentielle du réchauffement planétaire a diminué. Par ailleurs, elles ont permis d’obtenir des rendements économiques positifs et de réduire les besoins en eau, en main-d’œuvre, en azote et en énergies fossiles par unité d’aliment produite (Ladha et al. 2016). 3
Impacts et leçons apprises
En dépit de ses nombreux atouts positifs, l’AC n’est pas universellement applicable et des approches novatrices sont souvent nécessaires pour sa promotion auprès des petits exploitants agricoles. Au rang des contraintes possibles figurent les points ci-après :
- l’insuffisance de la quantité de résidus et le besoin des résidus de cultures comme aliment-bétail ;
- de l’engrais est parfois nécessaire en complément des résidus de légumineuses pour augmenter les rendements des cultures et la quantité de résidus de cultures disponible ;
- les adventices constituent un défi majeur dans les systèmes culturaux des petits exploitants agricoles ; nombre d’adaptations de l’AC utilisent des herbicides pour lutter contre ces mauvaises herbes ; et
- bien que l’AC puisse améliorer les rendements à long terme, il se peut que les agriculteurs aient à attendre 3 à 7 ans pour voir cette amélioration. Comme c’est le cas pour d’autres investissements à long terme, la précarité du régime foncier constitue une contrainte supplémentaire (Richards et al. 2014). 2
Voir également plusieurs études de cas d’Afrique sur le site suivant : http://www.fao.org/agriculture/crops/thematic-sitemap/theme/spi/scpi-home/managing-ecosystems/conservation-agriculture/ca-cases/en/
References
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1
FAO. 2009. Scaling-up Conservation Agriculture in Africa: Strategy and Approaches. Addis Ababa, Ethiopia: The FAO Subregional Office for Eastern Africa.
http://www.fao.org/ag/ca/doc/conservation.pdf Cette brochure vise à servir de base à la mise à échelle de l’agriculture de conservation en abordant la stratégie et les approches permettant de mobiliser les décideurs et les autres parties prenantes (agriculteurs, agropastoralistes et éleveurs, bailleurs de fonds, chercheurs, vulgarisateurs et secteur privé) autour du défi consistant à aller au-delà des parcelles d’essai et de démonstration. -
2
Richards M, Sapkota T, Stirling C, Thierfelder C, Verhulst N, Friedrich T, Kienzle J. 2014. Conservation agriculture: Implementation guidance for policymakers and investors. Climate-Smart Agriculture Practice Brief. Copenhagen, Denmark: CCAFS.
https://cgspace.cgiar.org/rest/bitstreams/34456/retrieve L’agriculture de conservation (AC) peut améliorer la résilience aux changements climatiques et contribuer à l’atténuation de ces changements. Les avantages de l’AC sont très spécifiques au site. Des approches novatrices sont nécessaires pour surmonter les obstacles de son adoption par les petits exploitants agricoles. -
3
Ladha JK, Rao AN, Raman A, ..., Noor S. 2016. Agronomic improvements can make future cereal systems in South Asia far more productive and result in a lower environmental footprint. Global Change Biology 22, 1054-1074.
http://www.ncbi.nlm.nih.gov/pubmed/26527502 Les pays d’Asie du Sud devront doubler leur production alimentaire d’ici à 2050, tout en utilisant plus efficacement les ressources et en réduisant au minimum les problèmes environnementaux. Des approches de gestion transformatrices et des solutions technologiques seront nécessaires dans les principales régions de production de céréales qui serviront de base à la sécurité alimentaire et nutritionnelle future. Cette étude a été menée dans quatre lieux qui représentent les principaux systèmes de production alimentaire des régions à forte densité de population de l’Asie du Sud. De nouvelles plateformes de recherche sur l’échelle de production ont été mises en place afin d’évaluer et optimiser trois systèmes culturaux et scénarios de gestion (S2, S3, S4) futuristes par rapport au mode de gestion actuel (S1). L’adoption des meilleures pratiques de gestion agronomique, y compris l’agriculture de conservation et la diversification des systèmes de culture, a permis d’augmenter considérablement la productivité des systèmes de culture du riz et du blé en Asie du Sud, tout en réduisant l’intensité potentielle du réchauffement planétaire. Des rendements économiques positifs et une moindre consommation d’eau, de main-d’œuvre, d’azote et d’énergie fossile par unité d’aliments produite ont été obtenus. Par rapport à S1, S4, où les meilleures pratiques de gestion, l’AC et la diversification des cultures ont été appliquées de la manière la plus intégrée, le rendement énergétique des céréales a été de 54 % plus élevé avec une augmentation de 104 % du rendement économique, et une intensité potentielle du réchauffement planétaire en baisse de 35 %. Les pratiques d’agriculture de conservation étaient les plus appropriées pour intensifier et diversifier les rotations blé-riz, mais moins pour les systèmes riz-riz. Cette constatation met en évidence également la nécessité de caractériser les zones appropriées pour l’AC et le ciblage technologique ultérieur. Un ensemble complet de données de référence généré dans le cadre de cette étude permettra de prédire l’extension des avantages à une plus grande échelle.