Contexte 1 2
Les bovins de race locale qui sont élevés dans les pays en développement sont bien adaptés à leur milieu du point de vue de la résistance aux maladies, de la tolérance à la chaleur et de la faiblesse des besoins nutritionnels. Cependant, leur productivité est faible et la quantité de GES qu’ils émettent par kilogramme de lait et de viande peut être très élevée. La stratégie consistant à choisir des animaux plus productifs peut améliorer la productivité et réduire l’intensité des émissions. À cet effet, des chercheurs ont tenté d’utiliser la variabilité génétique naturelle au sein des populations de bovins pour générer des bovins à faibles émissions, mais les résultats de leurs travaux ne sont pas encore concluants.
Lien avec l’AIC
Les programmes de croisement comportent des avantages simultanés en termes d’adaptation, de sécurité alimentaire et d’atténuation. Les bovins croisés conçus pour les prairies tropicales du Nord de l’Australie affichent davantage de tolérance à la chaleur, de résistance à la maladie, de condition physique et de caractéristiques de reproduction, par rapport aux races normalement utilisées. Ces stratégies utilisent des races adaptées au milieu local qui sont tolérantes à la chaleur, à la mauvaise nutrition, ainsi qu’aux parasites et aux maladies ; et qui seront de plus en plus utiles, à mesure que le climat changera. La combinaison du croisement et de l’intensification du régime alimentaire peut favoriser des gains considérables d’efficacité tant en termes de production animale que de réduction de la production de méthane. L’adoption généralisée de cette pratique se traduirait par des animaux moins nombreux, mais de plus grande taille et plus productifs, ce qui aurait des conséquences positives pour la production de méthane et l’utilisation des terres.
Impacts et leçons apprises
Le passage à des bovins croisés à plus fort potentiel de production de lait et d’un poids corporel plus important se traduira par des réductions modestes de la quantité de méthane produite par tonne de lait. Toutefois, étant donné que les animaux croisés produisent davantage de lait et de viande, moins d’animaux sont nécessaires pour répondre à la demande. Thornton et Herrero (2010) 3 ont évalué les effets du passage généralisé (29 % d’ici à 2030) à des bovins croisés sur la production de viande dans les systèmes de pâturages et sur la production de lait dans les systèmes mixtes des régions tropicales. Les animaux de plus grande taille produisent plus du double de la quantité de lait et de viande que produisent les animaux de race locale. L’utilisation des races locales uniquement pour répondre à la demande de lait en 2030 exigerait 363 millions de têtes de bovins, tandis que 173 millions de têtes supplémentaires seraient nécessaires pour satisfaire la demande de viande. Si 29 % des bovins de ces races locales étaient remplacés par des bovins issus de croisements, ces chiffres pourraient être ramenés à 308 millions de bovins pour la production de lait et 145 millions pour la production de viande. Une intervention à cette échelle a un potentiel d’atténuation d’environ 6 Mt CO2e.
References
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Thornton PK, Herrero M. 2014. Climate change adaptation in mixed crop-livestock systems in developing countries. Global Food Security 3(2):99-107.
http://dx.doi.org/10.1016/j.gfs.2014.02.002 Les systèmes mixtes combinant agriculture et élevage produisent la majeure partie du lait et de la viande de ruminants dans le monde et revêtent une importance particulière pour les moyens d’existence et la sécurité alimentaire des populations pauvres dans les pays en développement. Ces systèmes supporteront tout le poids de la contribution à la satisfaction de la demande croissante de vivres d’une population en pleine augmentation, en particulier en Afrique subsaharienne et en Asie du Sud, où la pauvreté rurale et la faim sont déjà concentrées. Les impacts potentiels des changements et de la variabilité climatiques sur ces systèmes mixtes ne sont pas bien compris, notamment en ce qui concerne la manière dont la sécurité alimentaire des ménages vulnérables peut être affectée. Il existe de nombreuses façons pour les systèmes mixtes de s’adapter aux changements climatiques à l’avenir, y compris grâce à l’amélioration de l’efficacité de la production qui comporte parfois, par ailleurs, d’importants coavantages en termes d’atténuation. Toutefois, une adaptation efficace nécessitera un cadre politique, technique, infrastructurel et informationnel favorable et le défi du développement est redoutable. -
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FAO. 2013a. Climate-Smart Agriculture: Sourcebook. Rome, Italy: Food and Agriculture Organization of the United Nations.
http://www.fao.org/3/a-i3325e.pdf D’ici à 2050, la population mondiale augmentera d’un tiers. La plupart de ces 2 milliards de personnes supplémentaires vivront dans des pays en développement. Dans le même temps, davantage de personnes vivront en ville. Selon les estimations de la FAO, si les tendances actuelles de la croissance du revenu et de la consommation se poursuivent, il faudra augmenter la production agricole de 60 % d’ici à 2050 pour satisfaire les besoins alimentaires tant humains qu’animaux escomptés. Par conséquent, l’agriculture doit se transformer afin de parvenir à nourrir une population mondiale croissante et servir de base à la croissance économique et à la réduction de la pauvreté. Les changements climatiques rendront cette tâche plus difficile dans le cadre du scénario du statu quo, en raison de leurs effets néfastes sur l’agriculture, ce qui nécessitera une spirale d’adaptation et de coûts connexes. -
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Thornton PK, Herrero M. 2010. The potential for reduced methane and carbon dioxide emissions from livestock and pasture management in the tropics. PNAS 107(46):19667–19672.
http://dx.doi.org/10.1073/pnas.0912890107 Nous calculons les réductions potentielles des émissions de méthane et de dioxyde de carbone provenant de plusieurs options de gestion de l’élevage et des pâturages dans les systèmes de production mixtes et axés sur les parcours dans les régions tropicales. Les effets de l’adoption de pâturages améliorés, l’intensification des régimes alimentaires des ruminants, ainsi que l’évolution des pratiques d’utilisation des terres et des races de grands ruminants, sur la production de méthane et de dioxyde de carbone sont calculés pour deux niveaux d’adoption : l’adoption complète, pour estimer la limite supérieure des réductions de ces gaz à effet de serre (GES) et des taux d’adoption optimistes mais plausibles tirés de la littérature, là où il en existe. Les résultats sont exprimés à la fois en GES par tonne de produit d’élevage et en Gt CO2-eq. Nous estimons que le potentiel maximal d’atténuation de ces options dans les systèmes d’élevage terrestre des zones tropicales représente environ 7 % du potentiel mondial d’atténuation agricole jusqu’en 2030. En utilisant les taux d’adoption historiques tirés de la littérature, le potentiel d’atténuation plausible de ces options pourrait contribuer à hauteur d’environ 4 % au volume global de la réduction des émissions de GES dues à l’agriculture. Ceci pourrait valoir quelque 1,3 milliard de dollars par an, au prix de 20 $ par tonne d’équivalent CO2. Cependant, les impacts au niveau du ménage et sur le plan socioculturel de certaines de ces options appellent une étude approfondie, car l’élevage joue de nombreux rôles dans les systèmes tropicaux, qui vont souvent bien au-delà de leur utilité productive.